đ€ CETTE SCĂNE QUI MâA MARQUĂ : Who Framed Roger Rabbit
Aujourdâhui, je mâattaque Ă un monument de mon enfance sortie en 1988 et rĂ©alisĂ© par Robert Zemeckis : Who Framed Roger Rabbit
Roger Rabbit, câest le genre de film que jâai vu 100 fois Ă©tant enfant. Câest drĂŽle comme a un certain Ăąge, on est capable de voir 10 fois le mĂȘme film dâaffilĂ© sans jamais ĂȘtre blasĂ©. Je connaissais toutes les rĂ©pliques par cĆurs mais surtout, jâĂ©tais plus quâintriguĂ© par le personnage dâEddie Valiant. Quelque chose en lui me fascinait.
Plus tard, lorsque jâai revu le film avec des yeux de jeune adulte, jâai compris que ce film nâĂ©tait en rĂ©alitĂ© pas totalement pensĂ© pour un enfant. Certes, il utilisait les codes des cartoons, mais ces codes Ă©taient dĂ©tournĂ©s et mis au service dâun polar noir oĂč se cĂŽtoient des thĂ©matiques dâadultes.
Et cet Eddie Valiant⊠qui me fascinait tellement Ă©tant enfant a pris une autre dimension. Jâai enfin compris quel personnage brisĂ© il Ă©tait. Roger Rabbit est certes une prouesse technique dingue pour lâĂ©poque (et qui nâa pas tant mal vieilli que ça.) mais câest surtout avant tout l'histoire d'un homme Ă©crasĂ© par le poids de son passĂ©.
Puis, je lâai revu bien plus tard alors que je mâĂ©tais attelĂ© depuis un bon moment dĂ©jĂ Ă apprendre, comprendre et reproduire les codes cinĂ©matographiques pour mes propres projets. Le film a alors pris une nouvelle dimension pour moi et en particulier la scĂšne dont jâai envie aujourdâhui de vous parler.
Nous sommes encore dans la phase dâexposition du film et nous apprenons encore Ă connaĂźtre le personnage principal Eddie Valiant jouĂ© par Bob Hoskins (Jâadore Bob Hoskinsâș). A cette Ă©tape, tout ce quâon sait de lui, câest que câest un grincheux, alcoolique et qu'il dĂ©teste par-dessus tous les cartoons.
Commence alors la scĂšne qui nous intĂ©resse. Elle commence avec la musique dâAlan Silvestri qui, avec son saxophone rĂ©sonne comme une complainte mĂ©lancolique. Il y a dans ces notes de piano et de saxo toute la tristesse dâEddie Valiant.
Zemeckis a lâintelligence au montage de faire enchainer cette scĂšne juste aprĂšs une scĂšne avec Roger Rabbit qui pleure, seul, dans une ruelle en regardant une photo. Il y a dĂ©jĂ lĂ tous les Ă©lĂ©ments de la scĂšne qui va suivre : Pleur, solitude et souvenir.
Eddie Valiant apparait en ombre chinoise derriĂšre une porte avec lâinscription « Valiant & Valiant Private investigation ». Jusquâalors, on ne savait pas quâil avait Ă©tĂ© dĂ©tective privĂ© en duo avec un membre de sa famille.
Eddie entre dans son appartement sale, glauque et en bordel. LâĂ©tat de son appartement est Ă lâimage du personnage : nĂ©gligĂ©.
On le voit alors regarder des photos quâil vient de dĂ©velopper. A cĂŽtĂ© de lui, une bouteille de whisky pleine.
Commence alors une petite visite de son passĂ© en un seul plan sĂ©quence qui enchaĂźne les objets, les articles de journaux et les photos jusquâĂ revenir Ă Eddie endormie sur la table, la bouteille de whisky vide Ă cĂŽtĂ© de lui.
Il nây a pas de longues discussions, pas de personnage qui exprime Ă haute voix les douleurs de son passĂ© parlant plus pour les spectateurs que pour les personnages. LĂ , en 2 minutes et 7 secondes, sans un seul dialogue, Robert Zemeckis nous livre les Ă©lĂ©ments marquant du passĂ© du personnage. Je le comprends, je suis en empathie avec lui et il me semble encore plus misĂ©rable quâau dĂ©but. A cette Ă©tape du film, je sais Ă qui jâai Ă faire et je me dis que le chemin quâil a Ă effectuĂ© pour sortir la tĂȘte de lâeau va ĂȘtre compliquĂ©. TrĂšs compliquĂ©.
Cette séquence est pour moi une véritable leçon de mise en scÚne tout en simplicité et en efficacité.
Pour toutes ces raisons, lorsque je veux me rappeler pourquoi jâai souhaitĂ© faire du cinĂ©ma⊠et bien je regarde cette scĂšne et je me souviens.
Et toi ? Est-ce que cette scÚne ta marqué ?
Comments